© JACAMON / MATZ / CASTERMAN 2005

CYCLOPES, dessin Luc JACAMON, scénario MATZ

Editions Casterman, collection Ligne rouge, série créée en 2005, 3 tomes

Au sein de l'ONU, les débats sont vifs. Le "maintien de la paix" coûte très cher, l'efficacité des opérations reste discutable, les moyens ne sont pas suffisants pour intervenir rapidement un peu partout sur le globe. A la majorité, les diplomates se rallient à une brillante idée : déléguer ce sale boulot à une société privée, sélectionnée sur appel d'offres. La première firme à remporter le jackpot s'appelle Multicorp Security Inc. Bien entendu, tous les regards sont rivés sur les premières opérations privées, pas question de se louper, d'autant que les agents sont équipés de caméras qui retransmettent en direct à la télévision les images des combats.

Or le hasard propulse en première ligne une jeune recrue, Douglas Pistoia, qui s'est engagé, malgré les craintes de son épouse, pour fuir le chômage. Dans le feu de l'action, Douglas réagit en héros, déclenchant l'enthousiasme du public, qui en redemande. Les dirigeants de Multicorp, trop heureux de l'aubaine, s'empressent de promouvoir officier leur nouvelle star. Mais hors caméra, il vont aussi lui demander de faire ses preuves, avec cynisme et cruauté. Si la guerre devient un spectacle, qui sait ce qui peut se produire dès que le rideau retombe...

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Pour une fois, voilà un héros qui se comporte comme un salaud ordinaire, ça nous change! Certes, tant que Douglas est un homme désireux de faire vivre sa famille, et prêt à risquer sa vie pour ça, on ne peut que le trouver humain. Mais lorsqu'il consent à massacrer des civils captifs sans même discuter l'ordre donné, la peur du chômage n'est plus une explication suffisante pour comprendre ses motivations. C'est assez déroutant, mais si l'objectif est d'amener le lecteur? se poser des questions, avec le personnage, c'est réussi.

Que le holding qui organise les raids, équipe les miliciens, et diffuse les images, magouille pour obtenir le marché, rien que de très classique. Mais les enjeux financiers sont tels que pour être sûrs d'intervenir dans un conflit, la meilleure technique consiste à les créer...

Le thème de l'action filmée en direct, et de ses dérives possibles, se retrouve aussi (côté police, cette fois) dans une autre série : Reality Show. On voit que dans les deux cas les auteurs ont cherché à imaginer ce que donnerait l'utilisation du direct pour des actions de sécurité publique. Et le résultat, divertissant et très abouti sur le plan graphique, est intéressant à découvrir. On apprécie aussi les personnages secondaires, le "vétéran" et l'épouse, dont on sent qu'ils auront un rôle à jouer dans la "conscience" du héros. Par ailleurs, les couleurs, chaudes ou froides selon les situations, mettent en relief un dessin original et abouti. A suivre donc...