© ROBERT / LIDINGRE / ASTIER / DARGAUD 2009

L'affaire des affaires scénario Denis ROBERT, story-board Yann LIDINGRE, dessin Laurent ASTIER

Editions Dargaud, one-shot 2009

Denis Robert, ex journaliste de Libé, a démissioné pour écrire un roman. Mais le journalisme, le vrai, le titille, et il se lance dans un bouquin sur l'évasion des capitaux, véritable "crime contre l'humanité" qui permet à la 5ème puissance mondiale (la France, si si !) de ne pas utiliser les fonds pour satisfaire les besoins de la population (autrement dit, nous). Le système arrange bien du monde... Les hommes politiques profitent des commissions discrètement versées à l'étranger pour financer leurs partis. Ils tiennent à ce que ces opérations restent secrètes, et ce faisant, camouflent la partie immergée de l'iceberg, c'est-à-dire l'évasion des capitaux d'affaires.

Denis Robert enquête et dénonce ce système contre lequel les juges anti-corruptions, tenus de respecter la loi, eux, et les frontières nationales (contrairement aux capitaux, précisément) ont toujours deux longueurs de retard, quand ils ne sont pas totalement impuissants. Mais il ne s'attend pas au succès que va rencontrer son livre. Il n'avait pas prévu la perte de contrôle de sa vie familiale qui va s'ensuivre, et encore moins son lynchage judiciaire, quand l'un des deux ex-ministre de l'intérieur aura décidé de faire un grand nettoyage...

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Qui n'a pas entendu parler de l'affaire Clearstream ?! de son corbeau, du règlement de compte entre un ministre de l'intérieur devenu Président, et un ex-ministre de l'intérieur qui était Premier ministre. Et qui a tout compris ?? Pas moi. D'abord parce que c'est relativement complexe, ensuite parce que plusieurs groupes (politiques, milieux d'affaires) n'ont pas spécialement intérêt à ce que les citoyens s'en mêlent de trop près.

En fait, ce roman documentaire autobiographique aurait pu s'intituler "le mamouth et les léopards", image qui décrit le rapport entre les juges et les spécialistes de l'évasion des capitaux. La lecture n'est pas désagréable, mais parfois un peu ardue. Les auteurs ont eu la bonne idée de présenter les choses via le facteur humain: la vie et la psychologie de Denis Robert et des autres protagonistes sont au premier plan pour illuster et faire passer le "documentaire", un peu à la manière des romans documentaires de l'altermondialiste Etienne Davodeau. Il faut dire que le sujet de l'évasion des capitaux ne passionnent pas les foules, bien qu'elles soient concernées au premier chef !!

Car lorsque l'on nous dit, que l'on nous répète, que l'Etat et les grandes entreprises n'ont plus d'argent pour financer nos emplois, nos logements, notre éducation, notre santé... On nous ment, tout simplement ! Tout est une question de répartition : répartition du chiffre d'affaires entre consommateurs, distributeurs et producteurs, répartition des bénéfices entre salariés et administrateurs, répartition du PIB entre secteur privé et public, et répartition du budget public entre les différentes priorités...

Reste ce constat, amer et un peu désespérant : les Etats (et la justice) sont tenus de respecter les frontières, les capitaux non. Le chemin de la régulation mondiale s'annonc long et difficile. Les bouquins et les albums comme celui-ci n'en sont que plus indispensables...