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VALERIAN : une série exceptionnellement créative
Loin de moi l'idée de prétendre que tel ou tel auteur est "le plus créatif" ! Quand bien même quelqu'un serait à même d'en juger, ce dont je doute, le tri serait bien difficile à faire tant les artistes regorgent d'imagination. Mais, objectivement, on ne peut qu'admirer l'univers né de la collaboration entre Christin et Mézières. J'ai eu envie d'en tirer quelques exemples :
Le climat de Syrte voit
se succéder des orages de glace soudains, où des trombes d'eau se figent en stalactites
gelées, suivis d'un redoux rapide qui fait germer instantanément des germes en
suspension dans l'atmosphère pour donner une pluie de fleurs bariolées et parfumées.
L'astéroide Slomp est un désert dont les habitants , immenses collines rocheuses, figés dans le sol, se fondent lentement en pleurant des larmes phosphorescentes qui sont un élixir d'immortalité.
Zahir est une planète creuse dont le noyau tient lieu de soleil. Sa population n'a jamais vu de soleil; totalement repliée sur elle-même, elle trouve encore le moyen de se déchirer: les hommes de Malka, dirigées par des matrones officiers brutales et grossières, affrontent dans une guerre sans fin et sans merci les femmes de Valsenar, menées par l'empereur et ses courtisans, poètes sensibles à la beauté. Entre eux, le peuple Lemm, où hommes et femmes vivent ensemble "normalement", extrait et livre des armes aux deux puissances rivales sans chercher à comprendre.
Créative toujours, la description de Point central : que toutes les races de l'univers décident de se retrouver en un même endroit, ça peut paraître logique. Mais que la station se soit "construite", si l'on peut dire, par empilement successif des cellules de chaque espèce jusqu'à devenir un amas dont même les shingouz ignorent la cartographie complète (c'est à peu près le seul renseignement qui leur ait échappé, c'est dire !), voilà qui est déjà plus éloigné du concept classique d'une cité bien propre et bien administrée (type "Babylone 5" - série fort sympathique par ailleurs). D'autant que si les races président à tour de rôle le conseil qui règle les litiges interstellaires, personne n'assure la police sur la station. Seuls les shingouz profitent du chaos pour vendre à tous les protagonistes leurs talents d'espions ou d'intermédiaires. Et tout le monde semble trouver normal que les très discrets zools, dont la planète fut jadis détruite, se chargent de nettoyer et d'entretenir Point Central. L'équilibre est fragile, mais la station a déjà tant vu défiler de race qu'une révolution n'y serait jamais que le début d'un nouveau cycle.
Originale encore, la méthode utilisée par la mère suprême de la planète Simlane pour renouveller la population, ainsi que le cadeau offert aux gagnants des concours...
Triste et poétique, l'histoire du peuple zom. Leur planète stérile n'a pu leur servir qu'à être vendue comme poubelle de l'espace. Vivant dans un taudis puant et malsain, ils passent leur temps à extirper des détritus les objets les plus divers pour édifier des autels d'une beauté incomparable aux dieux qu'ils attendent avec une touchante naïveté.
Last but not least, notons que la série gagne en profondeur (sans rien perdre en humour) à partir du moment ou notre bonne vieille terre est menacée et se dissout peu à peu dans les brumes du néant, jusqu'à disparaître finalement, pour d'autres raisons d'ailleurs que celles qui la dissolvaient progressivement. Dès lors, notre race n'est plus que virtuelle, Valérian et Laureline en sont les derniers représentants, ce qui permet de faire évoluer la réflexion sur la place de chaque espèce dans l'univers, mais aussi d'offrir au lecteur une intrigue subtile et complexe qui se décline sur plusieurs épisodes.
Deux planches illustrent bien la complémentarité du scénario et du dessin pour créer des mondes :
pour les voir cliquer ici ( ATTENTION ! fichier 800 Ko )