O'Boys

O'Boys, dessin Steve CUZOR, scénario Steve CUZOR et Philippe THIRAULT

Editions Dargaud, 1 album paru en 2009

Sud des Etats-Unis, 1931. Huck Finn (sur)vit dans une cahute, au bord du Mississipi. Son père, un contrebandier saoûl en permanence, passe son temps à cogner sur ses fils. Tom, l'ainé, décide de se barrer avec Suzy, une gamine que son père commence à tripoter. Inconscient du danger, Huck leur conseille de fuir de nuit par le fleuve, à bord d'une vieille barque. Mais à peine la frêle embarcation a-t-elle quitté la rive et disparu dans le noir, qu'elle coûle. Huck entent, impuissant, les cris des deux enfants, qui ne savent pas nager...

Le père disparaît, sans doute embarqué dans un trafic, et Huck se retrouve seul. Le shériff l'embarque et le fait adopter par un couple aisé. Le mari, un self-made-man qui possède une petite fabrique, espère former son nouveau fils pour qu'il reprenne l'affaire. Mais le garçon s'avère rebelle à toute forme d'instruction. En fait, il ne s'intéresse qu'à une chose: la musique des "nègres", avec lesquels il n'a pas le droit de frayer. Il s'incruste pourtant dans un bar où traîne les noirs le soir, et colle tellement aux basques de l'un d'eux, Charley Williams, musicien sans talent, qu'il le contraint à devenir son pote attitré.

Un jour, ne supportant plus le conformisme de sa vie de petit blanc fils de bourgeois, Huck décide de mettre en scène sa propre mort, comme si son père, dans un accès de violence, l'avait assassiné. il ignore qu'au même moment, le paternel vient de se faire buter. En s'enfuyant avec Charley Williams, il laisse croire à tous que son copain noir est le coupable.

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Les auteurs ont voulu restituer l'amérique de Mark Twaïn, des frères Cohen -clin d'oeil du titre, puisque comme dans O'Brother, les personnages principaux sont des vagabonds fuyards et rêveurs, pas très futés. Ils mettent en scène des héros pour lesquels la vie est rude, très rude.

Mais L'histoire est trop dense pour un premier tome. Plusieurs personnages importants apparaissent, disparaissent, réapparaissent et meurent. A la limite, pourquoi pas, sauf qu'on n'est pas dans une ambiance "Cluedo". Ces revirements trop nombreux finissent par desservir l'intrigue. Les auteurs abusent aussi des intermèdes oniriques, qui prennent trop de place par rapport à l'histoire "vécue" par Huck. Entraîné à la suite de ce gamin, paumé et instable, le lecteur ne sait plus trop où il va, ni pourquoi... On nous présente une galerie de personnages au caractère bien trempé, et on n'a le temps de s'intéresser à aucun d'eux. A la fin de l'épisode, il n'en reste plus que trois: Huck et Charley se planquent à bord d'un train, et on devine que l'on reverra le shériff, Josh Bisner, raciste et magouilleur. Peut-être Tom, le frère, refera-t-il surface, du moins c'est que Huck espère.

Reste le graphisme, efficace et fidèle à l'ambiance du pays et de l'époque. Mention spéciale pour le coloriste, Meephe Versaevel ! Les paysages sont rudes et hauts en couleurs, tout comme les gens du Mississipi. La crasse est présente partout, sauf dans les maisons bien proprettes des bourgeois blancs (grâce au travail des domestiques noirs, d'ailleurs). Deux sociétés, deux mondes, contraints de cohabiter, les uns ayant besoin du travail des autres, et les autres de l'argent des premiers. Des tensions, des heurts, du mépris, mais on n'a pas le choix. Et au milieu, coule une rivière...